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Découvertes

Pourquoi la hype autour de James Franco doit s’arrêter

Alors que le film "The Disaster Artist" de et avec James Franco sort en salles mercredi 7 mars, retour sur l’omniprésence médiatique un peu étouffante de l’acteur américain ces dernières années.

Axelle/Bauer-Griffin/Getty Images
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À seulement 39 ans, James Franco possède un CV long comme le bras : une centaine de longs-métrages à son actif, une douzaine de courts métrages, autant de téléfilms et de séries, mais aussi des casquettes de réalisateur, scénariste, écrivain, peintre ou professeur d’université. On aurait pu s’arrêter là et qualifier le Californien de héros des temps modernes, mais derrière le beau gosse hyperactif se cache en fait un personnage à l’ego surdimensionné désormais accusé de harcèlement sexuel. Et "The Disaster Artist" ne fait que cristalliser tout ce qu’on lui reprochait déjà.

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Un besoin permanent d’être le centre du monde

Un petit coup d’œil à la page IMDb de James Franco, et c’est la déferlante : plus d’une centaine de films en moins de vingt ans se bousculent dans la biographie de l’acteur, dont certaines années d’activité donnent le tournis. 7 films en 2007, 6 en 2014, 12 en 2017, l’Américain est sur tous les fronts, et tous les écrans. Car oui, quand il n’est pas au cinéma, il squatte nos feeds Instagram en postant selfies et autres mises en scènes gênantes sur son compte, fermé depuis. James Franco à moitié nu, James Franco au réveil, mais aussi James Franco et sa grand-mère en vidéo, impossible de passer à côté de l’acteur qui s’évertue à être partout, tout le temps.

Et puis, en 2005, il écrit et réalise "The Ape", son premier film, dans lequel il tient le rôle-titre. Un peu comme Marc Jacobs qui lance sa marque Marc by Marc Jacobs, la mégalomanie de l’acteur s’amplifie de jour en jour. À partir de ce moment, il commencera à écrire, scénariser et réaliser ses propres films, dans lesquels il tiendra presque toujours le rôle principal. Et quand il ne se met pas lui-même en scène, il s’auto interview pour le média américain Vice : en 2015, "Gay James Franco" interroge "Straight James Franco", puis sa version masculine questionne sa version féminine.

Le point culminant de cet ego trip est sans doute "The Disaster Artist". Réalisé par le Californien, le film raconte l’histoire vraie de Tommy Wiseau, réalisateur, avec l’aide de son meilleur ami Greg, du film devenu culte "The Room". Sorti en 2003, ce nanar absolu déclenche un torrent de critiques acerbes. Qualifié de "pire film de tous les temps”, il est rapidement déprogrammé des salles.

Alors que le rôle-titre est campé par James Franco dans cette adaptation, le second rôle est accordé à son frère, Dave Franco, un sosie troublant de l’acteur lui-même. Dès les premières minutes du film, c’est le malaise : au générique, le patronyme  "Franco" est littéralement omniprésent à l’écran.

Par contre, lorsque le vrai Tommy Wiseau tente quelques mots lors de la cérémonie des Golden Globes 2018, il est éjecté de la scène par l’acteur. C’est son film, et son histoire désormais. Un peu comme s’il voulait rappeler : "J’ai joué le loser, mais je n’en suis pas un, moi."

Les mêmes rôles, encore et encore

On pourrait aussi décrire James Franco comme un caméléon, pouvant s’approprier n’importe quel rôle : du rappeur gangster de "Spring Breakers" à l’aventurier un peu dingue dans "127 heures", en passant par l’activiste LGBT dans "Harvey Milk" ou le fils mal-aimé de "Spider Man". Mais en se penchant un peu plus en détail sur la carrière de l’acteur, on constate que, quand il ne joue pas son propre rôle (dans "Veronica Mars" ou "C’est la fin"), il joue dans ses propres films ("The Ape", "The Sound and The Fury", "Les Insoumis", "The Broken Tower" …) ou bien incarne des personnages qu’il a lui-même écrit ("Palo Alto"). L’idéal pour récolter les congratulations d’un public qui trouve que le rôle lui va comme un gant, quand il ne fait que se dessiner des rôles sur mesure.

Une mince frontière entre cinéma et réalité

Les rôles étroitement liés à son vécu, James Franco les multiplie. En 2013, dans "Palo Alto” – film tiré de son recueil de nouvelles du même nom et réalisé par Gia Coppola –, il incarne un professeur qui séduit ou se laisse séduire (au choix) par une de ses élèves, encore au lycée. Un an plus tard, dans la vraie vie cette fois, une jeune fille mineure publie sur Imgur une supposée conversation de drague un poil gênante avec James Franco. 

Pour "The Disaster Artist", l’acteur livre cette fois une sorte de méta-performance : il réalise et joue le rôle d’un homme qui lui-même réalise et joue dans son propre film. Une incarnation une fois encore directement inspirée de sa propre vie, qui ne lui permettra pourtant pas de rester convaincant tout au long du film. En tentant de s’approprier le personnage de Tommy Wiseau, James Franco tombe dans la caricature et grossit vulgairement les traits de caractères déjà bien explicites du réalisateur de "The Room". Mimiques, accent, déhanché, tout y est, mais en version démultipliée. "En faisant de Tommy – et donc, de sa propre imitation écervelée – le centre du film, James Franco reproduit le narcissisme et l’insensibilité de 'The Room'", écrit le critique Richard Brody dans The New York Times. Pas mieux.

Les accusations de harcèlement sexuel

Si bien sûr notre jugement sur son jeu d’acteur est complètement subjectif (après tout c’est ainsi qu’est l’art) et fera sans doute grincer des dents certains, personne par contre ne peut voir sous un bon jour les récentes accusations à l’encontre de James Franco.

Cinq accusations au lendemain des Golden Globes

Au lendemain de la cérémonie des Golden Globes 2018, où il a remporté le prix du meilleur acteur dans une comédie pour sa prestation dans "The Disaster Artist", cinq femmes l’accusent de comportements inappropriés et de harcèlement sexuel, dans les pages du Los Angeles Times. Quatre d’entre elles suivaient ses cours à l’école de cinéma Studio 4 – une école fondée par l’acteur en 2014, puis fermée fin 2017 –, tandis que la dernière était une aspirante réalisatrice. Et en voyant l’acteur arborer ce soir-là un bagde "Times Up", les plaignantes racontent s’être pris "une gifle en plein visage". L’acteur et sa défense ont immédiatement réfuté ces accusations, mais cela lui a tout de même valu d’être écarté des nominations aux Oscars.

"Joli pin's "Time's Up" James Franco. Tu te souviens de la fois où tu as poussé ma tête en direction de ton pénis dans une voiture ? Et la fois où tu as dit à mon amie de venir dans ton hôtel alors qu'elle n'avait que 17 ans ? Après avoir été coincé pour la même chose avec une autre fille de 17 ans ?"

Comme on l’évoquait plus haut, ce n’est pas la première fois que James Franco est confronté à de telles accusations. En 2014, il envoyait des messages privés à une adolescente de 17 ans pour l’inciter à le rejoindre dans sa chambre d’hôtel. Il a alors 35 ans et sait pertinemment que l’étudiante n’est pas majeure, comme les captures d’écran le prouvent, ce qui ne l’empêchera pas d’insister lourdement. Mais à l’époque, un rapide démenti avait suffi à étouffer l’affaire.

Un artiste désastreux ?

Même si une partie d’Hollywood semble vouloir mettre à l’ombre l’acteur, il est encore loin de connaître le sort de Kevin Spacey ou Dustin Hoffman. Ainsi dans "The Disaster Artist", on le voit avoir un comportement déplacé envers l’actrice qu’il dirige – un peu comme ce qui lui est actuellement reproché. Sauf que cette fois-ci, il est récompensé par l’industrie du cinéma pour sa performance.

Malgré un synopsis intéressant et quelques scènes mémorables – Zac Efron y tient un tout petit rôle, mais, aussi surprenant que cela puisse paraître, il crève l’écran –, "The Disaster Artist" compile absolument tout ce qui nous faisait tiquer chez James Franco depuis des années : narcissisme, exagération et impunité totale dans le monde du cinéma. En s’imposant à coup de rôles calibrés pour lui, l’acteur s’est ancré dans les esprits comme le mec sympa, un peu fou mais séduisant. Alors que son histoire personnelle semble, elle, prendre un tout autre chemin : celle de l’artiste désastreux qu’il s’évertue à jouer.

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