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RELIGION

Au SXSW, plaidoyer pour un ecosystème de start-up musulmanes

Au SXSW, le festival tech et créatif d'Austin, plusieurs entrepreneurs musulmans sont venus défendre un écosystème qui, espèrent-ils, démontre qu'il est possible d'être à la fois très moderne et religieux.

Les start-ups musulmanes commencent à se faire une place dans l'univers tech
Les start-ups musulmanes commencent à se faire une place dans l'univers tech Studio Graphique France Media Monde
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"Il est temps de changer la perception que le monde a de la communauté musulmane en ligne". Shahed Amanullah, un entrepreneur musulman américain cofondateur du site Affinis Labs, ne veut plus que la question de l’islam sur Internet se réduise à la lutte contre le terrorisme. Il est venu au festival SXSW 2017 (South by Southwest à Austin) pour démontrer qu’il existe une autre réalité : celle d’un écosystème grandissant de start-up musulmanes.

Dans un monde tech dominé par le modèle américain, où les jeunes pousses de la Silicon Valley n’ont d’autre dieux que Steve Jobs et l’argent, l’idée de start-up religieuses peut sembler saugrenue. Chris Abdur-Rahman, un Américain converti à l’islam en 2001, en a fait l’amère expérience : "Lorsque j’ai commencé à chercher des soutiens financiers pour mon site Launchgood – une sorte de Kickstarter pour le monde musulman – je n’ai rencontré que des refus, et un investisseur m’a même révélé qu’il trouvait l’idée très bonne, mais que le fond pour lequel il travaillait interdisait de financer des projets religieux".

Des réussites qui existent déjà

Pourtant aujourd’hui, vingt nouveaux projets sont soumis en moyenne sur Launchgood chaque jour et le site a permis à des entrepreneurs musulmans du monde entier de lever 13 millions de dollars, depuis son lancement en 2013. Cette plate-forme en ligne a même fait la une des médias, fin février, lorsqu’une initiative y a été lancée pour réunir des fonds afin de réparer un cimetière juif près de Saint-Louis, dans le Missouri. Plus de 150 000 dollars ont ainsi pu être levés. "L’idée était clairement de montrer, dans cette période de suspicions aux États-Unis à l’égard du monde musulman, que la communauté était ouverte à l’extérieur et pouvait avoir un impact positif pour tous", explique Chris Abdur-Rahman.

Il n’est pas le seul à avoir réussi à se faire sa place dans le monde des start-up en s’appuyant sur sa foi. Au Royaume-Uni, Shazia Saleem a comblé un vide en créant ieat, une société qui vend des plats cuisinés typiquement britanniques, mais hallal. Depuis 2014, cinq autres sociétés se sont placées sur le même créneau. En Indonésie, Dian Pelangi a réuni une communauté de cinq millions de fans de sa marque de mode musulmane sur Instagram et exporte maintenant ses créations partout dans le monde.

"Nous n’en sommes qu’au début, et nous sommes en train d’écrire les règles de ce que va devenir l’écosystème des start-up musulmanes", affirme Shazia Saleem. Le potentiel pour se développer existe. "Il y a 1,6 milliard de musulmans dans le monde, et même si on ne compte que les jeunes connectés, le marché représente tout de même 700 ou 800 millions de personnes", précise Shahed Amanullah.

Le Steve Jobs ou Bill Gates de la tech musulmane

"Ce qui manque pour que ce mouvement prenne son envol, c’est une vraie success-story, de celles qui ont bâti la réputation de la Silicon Valley", estime Chris Abdur-Rahman. Cette perle rare, ce Steve Jobs ou ce Bill Gates de la tech musulmane, c’est peut-être Abrar Hussain qui va la trouver. Ce responsable du fonds d’investissement californien Elixir Capital a mobilisé 250 millions de dollars en octobre 2016 pour financer des start-up musulmanes.

De gauche à droite : Chris Abdur-Rahman, fondateur du site Launchgood, Shahed Amanullah, co-fondateur d'Affinis Labs, Abbrar Hussain, responsable du fonds Elixir Capital, Shazia Saleem, créatrice de la marque ieat Foods.
De gauche à droite : Chris Abdur-Rahman, fondateur du site Launchgood, Shahed Amanullah, co-fondateur d'Affinis Labs, Abbrar Hussain, responsable du fonds Elixir Capital, Shazia Saleem, créatrice de la marque ieat Foods. Sebastian Seibt

Son but est "certes de faire de l’argent, mais aussi de participer à la réécriture de la définition de l’entrepreneur", explique-t-il. Il espère que dans un futur pas si lointain la figure de l’entrepreneur ne sera plus seulement incarnée par Steve Jobs ou Elon Musk (le patron de Tesla), mais aussi par quelqu’un qui vient d’un pays musulman ou qui serait une femme voilée. Cette quête de nouveaux modèles pour la jeunesse musulmane permettra, d’après Chris Abdu-Rahman "la renaissance de la communauté autour d’une idée radicale : un musulman peut être à la fois très moderne et très religieux".

Les start-up musulmanes ne montrent pas seulement la communauté sous un autre jour. Ce serait aussi un écosystème économiquement porteur. "Nous véhiculons un ensemble de valeurs éthiques issues de la religion qui peuvent nous donner un avantage", assure Shahed Amanullah. Il cite la manière dont les employés doivent être traités d’après les préceptes religieux, ou encore la confection plus équitables des produits. C’est certes aussi un argument marketing, et Abrar Hussain reconnaît volontiers qu’il peut "y avoir des entrepreneurs musulmans aussi immoraux que partout ailleurs", mais à l’ère des Uber et autres start-up américaines qui se font épingler pour leurs pratiques sociales douteuses, ce discours très éthique peut se traduire en vrai avantage compétitif.

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