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INÉGALITÉS

Inégalités sociales : le rapport choc mais discutable d’Oxfam

Dans son rapport annuel sur les inégalités sociales, l'ONG Oxfam conclut que la fortune des huit hommes les plus riches au monde dépasse celle de la moitié la plus pauvre de l'humanité. Une statistique choc à prendre avec des pincettes.

De gauche en haut à droite en bas : Bill Gates, Amancio Ortega, Warren Buffet, Carlos Slim, Jeff Bezos, Mark Zuckerberg
De gauche en haut à droite en bas : Bill Gates, Amancio Ortega, Warren Buffet, Carlos Slim, Jeff Bezos, Mark Zuckerberg AFP
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La fortune de huit personnes dépassant celle de 3,6 milliards de personnes : c'est ce qu'annonce, lundi 16 janvier, l’ONG Oxfam dans son rapport sur les inégalités et la concentration de richesse, publié comme chaque année à la veille de l’ouverture du Forum économique mondial à Davos. Si elle a le mérite de souligner, année après année, que les inégalités persistent, la statistique choc d’Oxfam déforme aussi la réalité.

Baptisé “une économie au service des 99 %”, le rapport énonce que les biens des huit milliardaires les plus riches du monde dépassent ceux de la moitié la plus pauvre de l’humanité. Le philanthrope et créateur de Microsoft Bill Gates, Amancio Ortega (fondateur de Zara), l’investisseur Warren Buffet, Carlos Slim (le magnat mexicain des télécoms), Jeff Bezos (le fondateur d’Amazon), Mark Zuckerberg (le patron de Facebook), Larry Ellison (le PDG d’Oracle) et Michael Bloomberg (propriétaire du média Bloomberg) disposent d’une fortune cumulée de 427 milliards de dollars. Les 50 % les plus démunis de la planète ne se partagent, quant à eux, que 409 milliards de dollars.

Cette comparaison frappante permet à Oxfam de dénoncer “l’extrême” concentration de richesse entre les mains d’une toute petite élite. Surtout, ces nouveaux chiffres démontrent que la situation a empiré. Le rapport 2016 de l’ONG avançait que la richesse des 62 plus grandes fortunes du monde était équivalente à celle de la moitié la plus pauvre de la population mondiale. En 2017, ils ne seraient plus que huit. Une accélération des inégalités qui va dans le sens du dernier rapport du Bureau international du travail (BIT), publié le 12 janvier, mettant en garde contre la multiplication des crises sociales en raison du fossé de plus en plus grand entre riches et pauvres.

Peu d’évolution en un an

Mais la nette différence entre les résultats de 2016 et de 2017 provient moins d’une accentuation des inégalités que d’un changement de méthodologie pour comptabiliser la fortune des plus pauvres. Oxfam reconnaît avoir procédé à des ajustements pour parer aux critiques, qui avaient déjà été adressées à l’ONG l’an dernier. En appliquant le même calcul que celui retenu cette année, la conclusion du précédent rapport aurait dû être que les neuf personnes les plus riches de la planète possèdent davantage que la moitié la plus pauvre. La situation n’a donc, en réalité, que peu évolué en un an.

Ensuite, la manière de comptabiliser ceux qui appartiennent au cercle des plus pauvres fait débat. Oxfam se réfère l’almanach 2016 de la richesse globale du Credit Suisse pour faire ce calcul. Ce document assimile la richesse au patrimoine, c’est-à-dire qu’il comptabilise les actifs d’une personne (ce qu’il possède) auxquels sont soustraits ses dettes, sans prendre en compte des sources de revenus comme le salaire.

Richesse = patrimoine ?

Une définition qui a tendance à mettre dans le même sac un diplômé de Harvard qui débute sa carrière à Wall Street et doit encore rembourser son crédit pour les études et des populations qui meurent de faim en Afrique mais qui n’ont pas de dette. Pire : cette comptabilité “fait qu’un retraité allemand qui a contracté un prêt pour s’acheter, par exemple, une voiture, est plus pauvre que les fermiers du Burundi qui eux n’ont pas le luxe d’emprunter”, souligne le quotidien de centre-gauche Süddeutsche Zeitung.

Cette comptabilité a aussi un autre défaut, selon le site d’information américain Fusion : “Il part du postulat que toute dette rend forcément plus pauvre, alors que certains emprunts sont des investissements qui peuvent être rentabilisés dans les mois suivants”.

Conscient de ces critiques, Oxfam, contacté par France 24, affirme que ces étudiants ou retraités allemands “ne sont qu’une infime minorité de cas sur les 3,5 milliards de personnes concernées”. Il n’en demeure pas moins que l’existence de ces “faux pauvres” relativise l’affirmation que huit milliardaires possèdent davantage que la moitié la plus démunie de la population mondiale.

Dans sa note de méthodologie, l’ONG reconnaît d’ailleurs qu’en ne prenant pas en compte ceux qui, comme les étudiants américains, ont une “richesse négative”, il faut la fortune des 56 milliardaires les plus riches - et non plus seulement de huit - pour égaler celle des 50 % les plus pauvres. “Ce qui ne fausse en rien la réalité globale de l’extrême concentration des richesses dans l'économie mondiale”, tiennent à souligner les auteurs du rapport d’Oxfam.

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