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ÉTATS-UNIS

Chelsea Manning, de lanceuse d’alerte à candidate anti-système au Congrès

À l’origine des révélations de WikiLeaks en 2010 sur les guerres en Irak et en Afghanistan, Chelsea Manning est entrée dans la course au Congrès américain en se présentant comme candidate démocrate dans le Maryland. Mais sa candidature interroge.

Chelsea Manning, le 2 mai 2018, lors d'une conférence à Berlin.
Chelsea Manning, le 2 mai 2018, lors d'une conférence à Berlin. Tobias Schwarz, AFP
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L’information avait été révélée en janvier par le Washington Post sans que l’on sache si elle souhaitait réellement faire campagne. Chelsea Manning a depuis confirmé sa volonté de se présenter aux élections de mi-mandat en mettant en ligne en janvier une vidéo puis, fin avril, son site officiel de campagne accompagné de ses premières propositions.

Née garçon avec le prénom Bradley, Chelsea Manning, 30 ans, est connue du grand public pour avoir transmis à WikiLeaks plus de 700 000 documents confidentiels relatifs aux guerres d’Afghanistan et d’Irak, alors qu’elle était analyste pour l’armée américaine. Condamnée en 2013 par une cour martiale à 35 ans de réclusion, elle est finalement sortie de prison en mai 2017 au bout de sept ans passés derrière les barreaux, après que l’ancien président Barack Obama a commué sa peine. C'est durant son incarcération qu'elle a changé d’identité sexuelle.

Depuis sa libération, Chelsea Manning vit des cachets qu'elle reçoit pour s'exprimer lors de conférences aux États-Unis et à travers le monde. Elle était ainsi à Berlin, le 2 mai, pour s'exprimer lors de la conférence sur la culture numérique re:publica. Elle se lance désormais dans la course aux "mid-terms" dans le Maryland, où elle réside depuis sa sortie de prison. Considérée par certains comme une lanceuse d’alerte et par d’autres comme une traitresse, Chelsea Manning se présente sur son site de campagne et lors de ses rares apparitions médiatiques en candidate anti-système.

La vidéo annonçant sa candidature donne le ton. Elle fustige la classe politique en mode dégagisme : "Nous n’avons pas besoin de davantage ou de meilleurs leaders, nous avons besoin de quelqu’un prêt à se battre. […] Nous devons leur prendre les rênes du pouvoir. Nous n’avons plus besoin d’eux, nous pouvons faire mieux."

Interrogée par Associated Press au début du mois, Chelsea Manning a ajouté qu’elle comptait participer à la primaire du 26 juin pour faire trembler "l’establishment démocrate", coupable selon elle de céder du terrain face à Donald Trump et de se laisser influencer par les groupes de pression.

Le sénateur sortant du Maryland, Ben Cardin, 74 ans, élu dix fois à la Chambre des représentants et qui espère être élu une troisième fois en novembre au Sénat, serait la parfaite illustration des dérives d’une classe politique "qui ne résiste pas", estime-t-elle. "Moi, je n’accepte pas d’argent venant des lobbyistes et je ne leur parle pas", affirme-t-elle avec fierté.

Fin des frontières, fermeture des prisons, suppression de la police…

Ses propositions sont pour le moins radicales. Chelsea Manning n’hésite pas à présenter l’État fédéral et ses agences de sécurité et de renseignement comme l’ennemi des citoyens américains. La candidate prône la suppression des frontières, la fermeture des prisons et la libération des prisonniers, la dissolution de la police, l’arrêt des programmes de surveillance de la population ou encore la fin des politiques de répression de l’usage et de la vente des drogues. Côté progressisme, elle propose la mise en place d’un revenu universel, d’une sécurité sociale universelle et défend le droit de se syndiquer et le droit de grève.

Un tel programme, qui reste par ailleurs vague ou muet sur de nombreux sujets, peut-il permettre à Chelsea Manning de remporter la primaire démocrate du 26 juin et d’être élue au Congrès ? Difficile à croire tant le Maryland ne fait pas figure d’État avant-gardiste, d’autant que Ben Cardin y jouit d’une grande popularité.

Pour de nombreux observateurs, Chelsea Manning pourrait en réalité ne pas vouloir réellement l’emporter. Alors qu’un sondage publié en février par le Goucher College, dans le Maryland, la donne largement battue (61 % des voix pour Cardin, 17 % pour Manning), elle ne fait pas campagne sur le terrain pour se faire connaître des électeurs, souligne Mileah Kromer, du Sarah T. Hugues Field Politics Center au Goucher College, interrogée sur la radio locale WTOP.

Par ailleurs, les dons qu’elle a reçus au premier trimestre ne s’élèvent qu’à 72 000 dollars quand le sénateur démocrate sortant a déjà récolté 336 000 dollars

"J’ai l’impression que sa candidature va plutôt lui servir à faire la promotion de son prochain livre et qu’il ne s’agit pas de quelque chose de sérieux", juge Dana Beyer, elle aussi candidate transgenre au Sénat du Maryland et à la tête de l’association Gender Rights Maryland, interrogée par Associated Press.

Une interview avec Democracy Now!, le 27 mars, semble d’ailleurs aller dans ce sens. À plusieurs reprises, Chelsea Manning s’est ainsi montrée réticente à répondre à certaines questions, prétextant qu’il s’agissait d’un "sujet qu’elle développait longuement dans son livre". Une façon de s’inscrire dans la longue histoire des candidats anti-système qui veulent "mettre en lumière l’Empire américain", selon Daniel Schlozman, professeur de sciences politiques à la Johns Hopkins University, interrogé par Associated Press.

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