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TERRITOIRES PALESTINIENS

Ahed Tamimi, figure de proue de la lutte contre l'occupation israélienne

La Palestinienne Ahed Tamimi, âgée de 17 ans, est devenue la pasionaria de la lutte contre la colonisation israélienne. Pour avoir giflé un soldat israélien, elle est jugée par un tribunal militaire.

La jeune Ahed Tamimi au tribunal militaire de Beitunia, en Cisjordanie occupée, le 28 décembre 2017.
La jeune Ahed Tamimi au tribunal militaire de Beitunia, en Cisjordanie occupée, le 28 décembre 2017. Ahmad Gharabli, AFP
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Icône de la résistance ou provocatrice patentée ? La jeune Palestinienne Ahed Tamimi ne laisse pas indifférent, ni dans les territoires palestiniens, ni en Israël. À 17 ans à peine, son nom remplit les réseaux sociaux avec les hashtags de soutien #FreeAhed ("#LibérezAhed"), ou est la cible d'insultes. Les uns réclament la libération de la jeune pasionaria, placée en détention durant deux mois avant l'ouverture de son procès le 13 février, les autres appellent à la vengeance contre elle.

 

Qu'a commis la jeune femme pour déchaîner à ce point les passions ? L’incident remonte au 15 décembre dernier et a été filmé avec un téléphone portable. Il se déroule en marge de manifestations parfois violentes contre la décision américaine de reconnaître Jérusalem comme la capitale d'Israël. Sur la séquence, la jeune activiste à la longue chevelure blonde et frisée et au regard bleu azur s’en prend à deux soldats israéliens en faction, dans le village de Nabi Saleh, en Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 50 ans par Israël. Avec sa cousine Nour Naji Tamimi, âgée de 21 ans, elle pousse, donne des coups de pied et va jusqu’à gifler l’un des militaires alors qu'il patrouille dans la cour de son domicile. Devant ce qui ressemble davantage à des provocations qu’à une réelle volonté de faire mal, l’homme armé reste impassible. La vidéo devient rapidement virale, se propageant aussi bien sur des sites pro-palestiniens que pro-israéliens, jusqu'à être relayée dans les médias.

Garde à vue prolongée

Dès lors, chacun y va de son commentaire. Les hommes politiques de la gauche israélienne saluent la retenue du militaire tandis, qu’à droite, on s’indigne de sa passivité. D’autres encore, plus virulents, à l’image du ministre israélien de l’Éducation Naftali Bennett, représentant du camp national religieux, expriment publiquement le souhait qu'Ahed Tamimi finisse "ses jours en prison."

Dans ce contexte d’indignation générale, l’armée procède le 19 décembre, soit quatre jours après les faits, aux arrestations d’Ahed Tamimi, de sa cousine, ainsi que de la mère d'Ahed, qui apparaît dans la séquence. Depuis, la jeune fille, placée en garde à vue prolongée par un tribunal militaire israélien de Cisjordanie, attend sa libération, qui devrait avoir lieu lundi prochain. Elle encourt sept années de prison.

"Ahed Tamimi ne s'est jamais tue"

La jeune Palestinienne n'en est pas à son premier coup d'éclat. En 2012 déjà, elle s'était distinguée en brandissant le poing sous le nez de soldats israéliens, des images qui avaient fait le tour du monde et qui lui avaient valu d'être reçue par Recep Tayyip Erdogan, alors Premier ministre turc.

La fillette lève un poing rageur devant un soldat israélien, le 2 novembre 2012, à Nabi Saleh.
La fillette lève un poing rageur devant un soldat israélien, le 2 novembre 2012, à Nabi Saleh. Abbas Momani, AFP

Trois ans plus tard, à l'été 2015, la jeune activiste apparaît sur des clichés également remarquées, au milieu de femmes tentant de faire lâcher prise un soldat plaquant contre un rocher un petit garçon au bras dans le plâtre, son petit frère. "Ahed Tamimi ne s’est jamais tue, commente Jean-Sébastien Letang, membre de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine à France 24. Elle incarne le nouveau visage de la résistance palestinienne, celui de toute une jeunesse ancrée dans un territoire, dégagé de toute étiquette politique."

Le 28 août 2015, à Nabi Saleh, la jeune fille tente de libérer son petit frère de l'emprise d'un soldat israélien.
Le 28 août 2015, à Nabi Saleh, la jeune fille tente de libérer son petit frère de l'emprise d'un soldat israélien. Abbas Momani, AFP

La résistance en héritage

La nouvelle icône de la lutte contre l’occupation israélienne n’est pas tombée dans le militantisme par hasard. Son père, Bassem Tamimi, est un activiste de longue date, bien connu et apprécié de tous les Palestiniens. "Toute la famille d'Ahed a toujours baigné dans la résistance non violente", abonde Renée Prangé, membre de l’association France Palestine solidarité. Ahed a déjà perdu un oncle, une tante et un cousin, tué par un soldat israélien. Un autre est actuellement gravement blessé après avoir reçu une balle dans la tête d’un soldat israélien. "De manière générale, le village de Nabi Saleh est entièrement impliqué dans la lutte contre l’occupant, organisant toutes les semaines des manifestations, qui souvent, hélas, tournent mal."

Ahed, la Malala de la Cisjordanie ?

Avant sa détention, la jeune fille, qui rêvaît de devenir footballeuse, expliquait dans une vidéo mise en ligne en février 2017 que l’occupation l’empêchait de songer à son avenir. Pour inverser la tendance, elle ne voyait qu’une chose à faire : "Résister, à travers les manifestations, mais aussi via les médias".

Est-ce à dire qu'elle connaîtra le même destin que celui de Malala, jeune militante et prix Nobel de la paix ? Rien n’est moins sûr, selon Renée Prangé. "Même si la notoriété d’Ahed Tamimi s’étend dans les médias, la cause de la Palestine est éminemment plus polémique que celle défendue par Malala, qui œuvre pour l’éducation des petites filles dans le monde."

Les militants pro-palestiniens à travers le monde ont affiché leur soutien à Ahed Tamimi, comme ici à Istanbul

À défaut de connaître la notoriété de la jeune Pakistanaise, Ahed Tamimi est déjà pour beaucoup le nouveau visage de la jeunesse palestinienne entrée en résistance. "Cette jeune femme non voilée, blonde aux yeux bleus, qui ne correspond pas l’idée que l’on se fait d’une Palestinienne, a davantage de chance de toucher les Occidentaux, qui peuvent facilement s’identifier à elle", poursuit la responsable associative.

"Belle", "magnétique", elle est aussi "le porte-drapeau de la jeunesse palestinienne durement réprimées, poursuit Jean-Sébastien Letang. Lors des dernières manifestations de décembre, 95 % des arrestations concernaient des adolescents." Actuellement, près de 450 mineurs palestiniens sont détenus par Israël, dont une centaine ont moins de 16 ans.

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