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ÉTATS-UNIS

L'ancien président américain George W. Bush, ce chic type qui peint des vétérans

L'ancien locataire de la Maison Blanche George W. Bush, peintre à ses heures perdues, a publié en février un recueil de portraits de vétérans qui est devenu un best-seller. Un retour en grâce décrypté par Jean-Éric Branaa, spécialiste des États-Unis.

L'ancien président américain George W. Bush présente son livre aux côtés d'un vétéran dont il a fait le portrait, le 28 février dernier à Dallas (Texas).
L'ancien président américain George W. Bush présente son livre aux côtés d'un vétéran dont il a fait le portrait, le 28 février dernier à Dallas (Texas). Laura Buckman, AFP
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On savait que l’ancien président des États-Unis peignait, et lorsqu’il avait exposé ses œuvres pour la première fois en 2014, elles avaient suscité bien des commentaires moqueurs. Les choses ont changé : "Portraits of Courage", le recueil de portraits de vétérans des guerres d’Irak et d’Afghanistan, publié en février par George W. Bush, a été salué par la critique aux États-Unis, et, contre toute attente, s’est hissé en tête des ventes dans la catégorie "essais et documents" du New York Times, ainsi que de la catégorie "peinture" sur Amazon.

Sous-titré "l'hommage d'un commandant en chef aux guerriers de l'Amérique", l'ouvrage rassemble 66 portraits de militaires blessés ou traumatisés qui ont servi dans l'armée après le 11-Septembre, en Irak ou en Afghanistan. George W. Bush les a tous personnellement rencontrés avant de les peindre à partir de photos.

Depuis, le retour en grâce est spectaculaire. "W", l’homme qui a lancé une guerre en Irak justifiée par un mensonge d’État, célèbre pour ses gaffes à répétition, pendant ou après ses deux mandats (2001-2009), fait le tour des talk-shows américains. Chez Ellen DeGeneres par exemple, figure cool et populaire, grande amie de Barack Obama, l’ancien locataire républicain de la Maison Blanche a été reçu avec bienveillance et déférence pour faire la promotion de son travail. Dans les colonnes du New Yorker, temple du chic new-yorkais, on a même salué les talents artistiques du fils de George W. H. Bush : "La qualité de son art est surprenant", va jusqu’à écrire Peter Schjeldahl, le critique maison.

Au-delà de cet engouement pour ces nouvelles activités, huit ans après la fin de son dernier mandat et alors qu’il avait été largement décrié lorsqu’il était aux affaires, il semble bénéficier d’une étonnante cote de sympathie. Que s’est-il passé ?

"Retour en grâce quasi inéluctable"

"Quand les hommes de pouvoir se retirent, le retour en grâce est quasi inéluctable. On observe ce phénomène partout dans le monde et en France aussi, avec par exemple Jacques Chirac, qui est devenu depuis quelques années une figure populaire glorifiée et sympa", estime Jean-Éric Branaa, spécialiste des États-Unis, maître de conférences à l’université de Paris II-Assas. Un retour en grâce d’autant plus fort que l’histoire traversée a été marquante ou difficile.

Le chercheur rappelle ainsi le traumatisme du 11 septembre 2001, tournant du premier mandat de Bush, et, dans la foulée, le vote du Patriot Act, qui a vu la nation américaine faire bloc derrière son président.

L’entrée en guerre des États-Unis contre l’Irak, en mars 2003, aura en revanche été le point noir de la présidence de Bush junior. Surtout rétrospectivement, depuis que l’on sait qu’elle était fondée sur un mensonge d’État - l’Irak de Saddam Hussein ne possédait ni ne produisait d’armes biologiques ou nucléaires justifiant une invasion américaine.

"Le mythe de la rédemption"

Environ 2,5 millions de militaires américains ont servi en Irak ou en Afghanistan depuis 2001. Parmi eux, 6 896 militaires ont été tués et plus de 50 000 blessés. Le choix de Bush de peindre ceux qui ont eu à pâtir dans leur chair de ses choix politiques ne devrait-il pas, dès lors, susciter la colère ou l’incompréhension des Américains ? "Au contraire, répond Jean-Éric Branaa, car les Américains l’ont vu comme un acte de rédemption, et c’est d’ailleurs ce que Bush sous-entend lui aussi par le choix de prendre des vétérans pour modèle."

Sur Instagram, le Texan a ainsi salué dans un billet "des hommes et des femmes remarquables qui ont été blessés en suivant [s]es ordres". "Je pense à eux tous les jours", a-t-il ajouté dans cette note accompagnée d'une photo sur laquelle il peint un de ces portraits.

Tous les bénéfices des ventes du livre seront reversés au programme mis en place par la fondation de George W. Bush pour faciliter le retour à la vie civile des vétérans de l'armée, a par ailleurs indiqué Crown, son éditeur.

"Le mythe de la rédemption est très fort aux États-Unis, insiste Jean-Éric Branaa. Le méchant à qui on donne sa chance et qui devient gentil, c’est un classique du cinéma et de la littérature. L’homme qui a été le plus puissant du monde pendant huit ans, qui humblement prend ses pinceaux et peint le quidam, c’est un symbole qui parle aux Américains", estime-t-il.

Pas de nostalgie pro-Bush

Après plus de trois mois de présidence Trump, marquée par les outrances et les mensonges, les Américains regretteraient-ils finalement celle de "W" ? Jean-Eric Branaa, qui souligne que l’actuel président reste très populaire, notamment auprès de sa base, est loin de penser qu’une vague de nostalgie pro-Bush envahit les États-Unis.

"En tant qu’ancien président, George W. Bush fait simplement figure de gardien du temple républicain, et les Américains lui ont été reconnaissants quand il a annoncé, le premier, qu’il assisterait à l’investiture de Trump, malgré leurs désaccords passés."

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