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ÉTATS-UNIS

Le drôle d’empressement des ex-conseillers de Trump à témoigner devant le Congrès

Trois anciens conseillers de Donald Trump, soupçonnés de liens avec la Russie, ont simultanément offert vendredi de s’exprimer devant la commission renseignement de la chambre des représentants, tout en assurant qu’il s’agissait d’une coïncidence.

De gauche à droite : Paul Manafort, Roger Stone et Carter Page
De gauche à droite : Paul Manafort, Roger Stone et Carter Page De gauche à droite : Chip Somodevilla, Getty Images North America/AFP ; Joe Raedle, Getty Images North America/AFP ; capture d'écran CNN
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Sacrée coïncidence, si c’en est une. Trois anciens conseillers de campagne de Donald Trump ont décidé d’informer, vendredi 31 mars, la commission Renseignement de la chambre des représentants, du fait qu’ils étaient prêts à participer à un "entretien", dans le cadre de l’enquête sur une éventuelle collusion entre l'entourage de l’actuel président américain et des responsables russes.

L’apparente coordination des trois hommes a ravivé les espoirs de réponses rapides concernant ces allégations. Mais les entretiens, informels, ne devraient pas être rendus publics et ne seront pas effectués sous le sceau du serment, bien que la législation américaine punisse tout de même les mensonges proférés hors-serment face au Congrès.

Un Américain en Ukraine

Le nom de Paul Manafort, d’abord, est associé à celui de Donald Trump en avril 2016, lorsque ce dernier le désigne comme directeur de sa campagne. La collaboration entre les deux hommes ne durera pas, puisque Manafort présente sa démission en août de la même année. En cause : la révélation de versements de plusieurs millions de dollars de la part du parti de Viktor Ianoukovitch, le président ukrainien pro-russe de l’époque, entre 2006 et 2009. Selon AP, la tâche de Manafort était alors d'influencer l’opinion publique américaine en faveur de Ianoukovitch.

Le 22 mars 2017, AP a également révélé l’existence d’un contrat, passé en 2006 entre Manafort et un oligarque russe proche de Vladimir Poutine, Oleg Deripaska, visant à "influencer la politique, les transactions commerciales et la couverture de l’actualité aux États-Unis, en Europe et au sein des anciennes républiques soviétiques, au bénéfice du gouvernement de Poutine". D’un montant de 10 millions de dollars par an, le contrat a été reconduit au moins jusqu’en 2009.

Ces révélations ont ajouté au trouble entourant l'entourage de l’actuel président pendant sa campagne. D’ailleurs, deux jours plus tôt, l’administration Trump tentait de minimiser le rôle de l’ancien directeur de campagne : le 20 mars, le porte-parole de la Maison blanche, Sean Spicer, affirmait qu’il avait "joué un rôle très limité pendant un temps très limité", ce que le site de factchecking Politifact a estimé être faux.

Vendredi, Paul Manafort a donc accepté – "volontairement", selon son avocat – le principe d’une "discussion informelle à huis clos" avec la commission Renseignement, selon le Washington Post.

Dialogue avec les hackeurs

Vieil ami de Donald Trump, Roger Stone a également été l'un de ses conseillers pendant la campagne et en a même tiré un livre : "La fabrication du président 2016". Il a aussi reconnu avoir communiqué avec Guccifer 2.0, le hackeur russe qui a revendiqué le piratage du parti démocrate (et que les services de renseignement américains soupçonnent d’être une façade de leurs homologues [les renseignements] russes).

Lors de l’échange, tellement "bref et banal" que Roger Stone a d’abord affirmé qu’il l’avait oublié, le hackeur proposait pourtant son "aide" le 17 août 2016. Stone a également reconnu à demi-mot avoir été indirectement en contact avec le fondateur de Wikileaks, Julian Assange, dont l’organisation a ensuite publié des e-mails de John Podesta, le directeur de campagne d'Hillary Clinton.

Les messages privés échangés sur Twitter par Roger Stone et un hackeur russe.
Les messages privés échangés sur Twitter par Roger Stone et un hackeur russe. Twitter

Roger Stone était-il au courant avant la publication de ces e-mails ? Le timing de certains de ces tweets laisse la question en suspens : 4 jours avant publication, il tweetait notamment : "J’ai pleine confiance dans le fait que Wikileaks et mon héros, Julian Assange, vont bientôt informer le peuple américain".

Comme Paul Manafort, Roger Stone est donc "désireux de se rendre de son plein gré" devant la commission Renseignement afin de "rectifier la fausse et trompeuse manière dont il a été dépeint par certains membres de la commission", selon son avocat.

Un conseiller diplomatique sous influence russe ?

Carter Page, enfin, qui a conseillé Donald Trump sur les questions diplomatiques lors de la campagne, s’est lui adressé, vendredi, directement à deux membres de la commission Renseignements : il a dit souhaiter saisir l’opportunité de "remettre les choses au clair" vis-à-vis des "mensonges répandus par certaines personnes suspectes, aux motivations politiques, coordonnées par l’administration Obama".

Ces soi-disant "mensonges" concernent les voyages effectués par Carter Page à Moscou en juin et en décembre 2016. Au cours du second, il aurait rencontré des hommes d’affaires et des "leaders d’opinion", a-t-il affirmé au site Sputnik, qui note que le terme "leader d’opinion" peut s’appliquer à des "officiels du gouvernement ou à des gens proche de l’establishment". Carter Page a par ailleurs reconnu, après avoir nié plusieurs fois, avoir rencontré l’ambassadeur russe Sergey Kislyak. Lors d’un entretien sur MSNBC, pressé par son interlocuteur, il a fini par lâcher : "Je ne vais pas nier que je lui ai parlé."

Notons que Carter Page entretient des liens étroits avec la Russie. Autrefois salarié de la banque d’investissement Merrill Lynch, il a vécu trois ans à Moscou pour y installer le nouveau siège de la banque. L’équipe de Donald Trump a aussi tenté de minimiser son importance, mais Politico raconte que "tout Washington murmure que Page a non seulement bel et bien participé à la campagne, mais a également servi de canal pour l’influence russe sur le candidat républicain".

Le quatrième homme

Les trois hommes assurent ne pas s’être coordonnés. Carter Page a ainsi déclaré à Business Insider ne "jamais avoir parlé à Paul Manafort de sa vie". Roger Stone a seulement reconnu auprès de CNN avoir parlé à Manafort "de temps en temps".

Les observateurs doutent que le tout nouveau désir de s’exprimer de ces trois ex-conseillers de Trump ait un réel impact sur l’enquête. "Offrir de s’exprimer est aisé, note ainsi Norman Eisen, ancien conseiller d’Obama sur les questions d'éthique. Reste à savoir s’ils vont vraiment se rendre à leur entretien, répondre aux questions qui leur seront posées, et le faire sous serment."

Un quatrième homme a, lui, tenté d’obtenir une immunité en échange de ce qu’il sait : il s’agit de Michael Flynn, l'ex-conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump. Flynn a été forcé de démissionner, le 13 février, après la révélation de contacts répétés avec le même ambassadeur russe au moment justement où l'administration de Barack Obama imposait des sanctions contre Moscou. L’option de l’immunité, selon une source anonyme au Congrès, ne serait pour le moment "pas sur la table".

Cet article a été traduit depuis l’anglais : cliquez ici pour lire la version originale.

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