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SYRIE - ÉTATS-UNIS

Une appli pour soigner les malades en Syrie, à 10 000 km de distance

Photo montrant une unité de soins intensifs dans un hôpital d'Alep. Une ONG américaine a installé une caméra dans cette salle pour effectuer des consultations à distance. Image transmise par notre Observateur.
Photo montrant une unité de soins intensifs dans un hôpital d'Alep. Une ONG américaine a installé une caméra dans cette salle pour effectuer des consultations à distance. Image transmise par notre Observateur.
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Les médecins se font de plus en plus rares en Syrie. Des milliers d’entre eux ont en effet fui en raison de la guerre qui ravage le pays depuis plus de quatre ans. Pour pallier cette pénurie, des médecins syriens installés aux États-Unis ont mis au point un procédé qui permet de soigner les blessés de guerre à près de 10 000 kilomètres de distance, à l’aide d’une simple application.

Zaher Sahloul est médecin spécialisé en soins intensifs. Installé à Chicago, il est membre de l'ONG Syrian American Medical Society.

Photo de l'application SmartCam qui permet de contrôler une caméra à distance depuis un smartphone. Cette technologie est utilisée par une ONG américaine pour soigner des patients en Syrie.

"C’est la première fois que la télémédecine est utilisée en zone de guerre"

Nous avons installé des caméras dans neuf hôpitaux situés dans des zones de combat, notamment à Alep, à Idlib, à Ma'arrat al-Numan et à Hama. Elles sont placées uniquement dans les unités de soins intensifs. Ces caméras sont reliées à une application installée sur un smartphone. C’est en fait une caméra toute simple, qui ne coûte pas plus de 100 euros, semblable à celles utilisées par les commerçants pour la vidéosurveillance.

Il suffit que j’ouvre l’application – qui s’appelle Smart Camera – sur mon téléphone pour voir ce qui se passe dans l’unité de soins intensifs de l’hôpital d’Alep, par exemple. Je peux demander au médecin ou à l’infirmier en face de moi de déplacer la caméra vers le patient, de me faire voir le moniteur des signes vitaux, etc. Une fois que j’ai suffisamment d’informations sur son état, j’oriente mon interlocuteur sur la façon de traiter le malade.

"A Alep, on compte un seul chirurgien vasculaire pour 200 000 habitants"

Je travaille avec un groupe de 15 médecins, pour la plupart d’origine syrienne, installés ici aux États-Unis. Cela nous permet de rester en contact permanent avec les médecins sur place.

Il s’agit de médecins spécialisés notamment dans la neurochirurgie, la chirurgie orthopédique et la chirurgie vasculaire. Cela correspond en fait aux blessures qui surviennent les plus fréquemment suite à des bombardements.

Ces spécialités sont donc primordiales dans les zones de guerre. Or, les quartiers d’Alep contrôlés par les rebelles et qui sont régulièrement bombardés par le régime comptent un seul chirurgien vasculaire et un seul chirurgien orthopédique pour près de 200 000 habitants.

"On veut montrer aux médecins sur place comment pratiquer les bons gestes"

Le procédé que nous avons mis en place est particulièrement utile pour le suivi postopératoire. Les 24 heures à 48 heures qui suivent une opération sont effectivement les plus délicats, car l’état du patient peut se dégrader à n’importe quel moment. Nous assurons donc la surveillance de ces patients jusqu’à ce qu’ils soient sortis d’affaire.

Nous traitons aussi toutes sortes d’urgences, comme les cas d’infarctus, d’insuffisance respiratoire, ou d’insuffisance rénale. L’idée est de montrer au médecin ou l’infirmier sur place comment pratiquer le bon geste au bon moment pour sauver la personne.

À côté de la consultation vidéo, nous échangeons également avec les médecins via les applications WhatsApp et Viber. Le médecin sur place peut par exemple m’envoyer les radios du patient pour que je lui donne mon avis sur son état.

"Tous nos efforts peuvent partir en fumée en un battement de cils"

La consultation à distance à l’aide de la vidéo n’est en fait pas un procédé nouveau. Il est utilisé dans plusieurs pays et permet aux médecins d’accéder aux patients des régions lointaines ou isolées. Par contre, c’est la première fois qu’il est utilisé en zone de conflit. Et en trois ans de pratique, cette technologie s’est avérée particulièrement efficace car elle nous a permis de former nombre de médecins et d’infirmiers au fil des mois.

Le seul problème avec ce dispositif, c’est que les hôpitaux avec lesquels nous travaillons sont sans cesse sous la menace de bombardements. Un hôpital peut être détruit à tout moment par un missile et nos efforts partir ainsi en fumée en un battement de cils.

De nombreux hôpitaux avec lesquels il travaille ont aujourd’hui déménagé dans des locaux sous-terrains, afin d’éviter les bombes.

Depuis le début du conflit en mars 2011, plus de 90 % des médecins auraient fui la Syrie, selon l’Union des organisations de secours et soins médicaux, une association humanitaire de médecins syriens exerçant en France. Depuis août 2012, plus de 177 hôpitaux ont été détruits et près de 700 médecins et travailleurs de la santé ont été tués, indique en outre l’association.

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