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ZIMBABWE

Ces festins d’anniversaire qui énervent l’Occident mais amusent le président zimbabwéen Mugabe

Comme chaque année, le président zimbabwéen a fêté son anniversaire dans un faste malvenu. Des agapes qui suscitent l’indignation de l’opposition et des médias occidentaux. Mais offrent une tribune politique idéale à un régime à bout de souffle.

Robert Mugabe entouré de son épouse, Grance (à g.), et de sa fille, Bona, lors des célébrations de son 92e anniversaire, le 27 février.
Robert Mugabe entouré de son épouse, Grance (à g.), et de sa fille, Bona, lors des célébrations de son 92e anniversaire, le 27 février. Jekesai Njikizana, AFP
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L’image a beau être déplorable pour le régime d’Harare, c’est tous les ans le même rituel. Malgré une économie zimbabwéenne exsangue, la Zanu-PF, le parti au pouvoir dans le pays, célèbre en grande pompe l’anniversaire du président Robert Mugabe. Cette année, le montant des agapes organisées pour fêter les 92 ans du doyen des chefs d’État africains ont atteint les 800 000 dollars. Et quelque 50 000 personnes avaient été invitées à prendre part au festin qui s’est tenu le 27 février à Masvingo (sud) en présence du couple présidentiel.

Le menu des réjouissances donne le tournis, comme le rapporte Jeune Afrique : 300 kilos de bœuf, des centaines de kg d’animaux et des gâteaux en pagaille, dont l'un en forme d'Afrique et un autre de 92 kg empruntant sa forme au monument national du Grand Zimbabwe, un ensemble de ruines du XIIIe siècle, classé au patrimoine mondial de l'Unesco.

Dans un pays où entre 5 % et 10 % de la population seulement possèdent un emploi formel et où plusieurs régions sont en proie à l’insécurité alimentaire pour cause de sécheresse, le faste du banquet passe mal. D’autant que, selon l’AFP qui cite des médias locaux, des militants auraient ordonné à des villageois des districts autour de Masvingo de donner entre un et cinq dollars pour financer une partie de la fête.

"Nous voulons des emplois, pas une fiesta"

Peu avant la ripaille, le principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement Démocratique (MDC), a manifesté à Masvingo en brandissant des pancartes "Pas d'anniversaire quand les enfants meurent de faim", ou "Nous voulons des emplois, pas une fiesta".

À la Zanu-PF, on ne voit pourtant pas où est le problème. Dans les médias locaux, Pupurai Togarepi, chef de la Ligue des jeunes du parti, considère que l’événement n’a rien à voir avec l’argent : "Il s’agit de la reconnaissance de l’incroyable histoire de notre président".

>> À lire sur France 24 : "Météo, choix politiques et sanctions : les raisons de 'l'état de catastrophe naturelle' au Zimbabwe"

"Il n'y a pas grand-chose à célébrer pour quelqu'un de 92 ans, au pouvoir depuis trente-six ans, qui a conduit à la faillite notre économie, réduisant notre pays à une nation de vendeurs à la sauvette et de mendiants", rétorque Takavafira Zhou, professeur de science politique à l'université de Masvingo.

"Quand vous avez un chef qui dépense 800 000 dollars pour son anniversaire, et que des milliers de gens n'ont rien à manger, vous vous demandez quel genre de père [de la nation] vous dirige", estime Okay Machisa, président de l'Association des droits de l'Homme au Zimbabwe.

"Ici au Zimbabwe, cela se fait !"

Ce n’est pas la première fois qu’un anniversaire présidentiel suscite l’indignation. En 2008 déjà, alors que le pays connaissait une inflation hors norme (231 millions % par an), "Comrad Bob" avait soufflé ses 84 bougies dans un luxe d’autant plus malvenu qu’il était ostentatoire. Depuis, chaque festin est l’occasion pour la presse occidentale de dénoncer incurie, gabegie et provocations du régime de Mugabe.

Car jamais le pouvoir zimbabwéen n’a caché le gargantuesque de ces célébrations. "Je ne vois pas en quoi c’est un scandale, ici au Zimbabwe, cela se fait !", fanfaronne dans Jeune Afrique un militant de la Zanu-PF à l’adresse des médias étrangers toujours prompts, selon Harare, à donner de leçons de bonne gouvernance.

Conscient que chaque festin sera désormais scruté à la loupe, le régime vieillissant de Mugabe semble chaque année faire toujours plus dans la démesure. Comme un pied de nez aux puissances occidentales, auxquelles le président zimbabwéen ne manque jamais d’envoyer des piques. Surtout lors de ses anniversaires, qu’il a su transformer en tribune politique.

"Les Britanniques et les Américains, comme toujours..."

La dernière fête n’a pas échappé à la règle, puisqu’il a accusé des ingérences étrangères d'être à l'origine des luttes intestines qui divisent actuellement la Zanu-PF. "Les Britanniques et les Américains, par leurs ruses, comme toujours, ont utilisé ces occasions pour offrir de grosses sommes d'argent à des individus du parti et de l'extérieur du parti, provoquant des divisions", a-t-il affirmé.

Depuis un an, à la suite de rumeurs sur l’état de santé du chef de l’État, une bataille de succession a en effet éclaté au sein du parti. Robert Mugabe estime, lui, qu’il faudra compter sur lui jusqu’à ses 100 ans. Ce qui fera beaucoup de bougies à éteindre pour un pouvoir à bout de souffle.

Avec AFP

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