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Découvertes

"Pédé", "cuck", "autiste" : victime de cyberharcèlement, le youtubeur Dany Caligula "répond à Internet"

Depuis plus d'un an, il n'avait posté aucune vidéo en ligne. Le youtubeur français Dany Caligula est revenu pour évoquer le harcèlement qu'il a subi, et s'est confié à Mashable FR.

Dany Caligula/YouTube
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"Je flippe ma race". Samedi 30 juin, Dany Caligula postait sur sa chaîne YouTube une vidéo "difficile". "Intime". Baptisée "réponse à Internet", elle revient sur le cyberharcèlement dont il est victime depuis près de deux ans.

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Tout commence le 19 octobre 2016. Dans une vidéo d’une quarantaine de minutes, celui qui est alors étudiant en master de philosophie et bioéthique évoque "le cas Raptor Dissident". Ce dernier, qui s'en était déjà pris à Dany dans une vidéo sur la loi Travail en mai 2016, réalise sur sa chaîne ce qu’il nomme des "revues d’actualité avec une bonne grosse dose de haine". Dans l’une d’entre elles, il cible Marion Seclin, comédienne et chroniqueuse, pour ses positions sur le féminisme et le harcèlement de rue. S’en suit une longue campagne de harcèlement à l'encontre de Marion Seclin.

Ironiquement, c’est à cause de cette vidéo, vue plus de 500 000 fois, que son propre harcèlement va débuter

C’est pour dénoncer ce harcèlement et plus globalement "la montée de la violence sur YouTube" que Dany Caligula, qui parle philosophie, politique et actualité sur sa chaîne, tourne "Le cas Raptor Dissident". Ironiquement, c’est à cause de cette vidéo, vue plus de 500 000 fois, que son propre harcèlement va débuter.

Insultes et menaces de mort

Très vite, il reçoit des insultes. On le traite de "cuck" (terme qui désigne un homme "faible", à la recherche d’attention), de "pédé", de "bobo", de "social justice warrior" (personne qui défend des idées progressistes), d’"autiste". On lui recommande de "fermer sa gueule", on lui dit que "sa mère aurait bien fait d'avoir un cancer avant qu’il ne naisse". On le menace de mort.

Il décide d'arrêter ses vidéos en avril 2017. Il s'agit de sa seule source de revenus, et son statut d'auto-entrepreneur ne le protège guère. Sans nouveaux contenus, sa cagnotte Tipeee, qui lui permet d'obtenir une rémunération mensuelle, fond également. Les dettes s'accumulent, la déprime s'installe. "YouTube était mon rêve, le truc qui m'a permis de m'en sortir", expliquait-il dans un tweet en mars, ajoutant plus loin : "Je suis épuisé, j'en peux plus, je craque".

"Un an après, les gens me reconnaissaient encore dans la rue ou commentaient quotidiennement mes vidéos de manière négative (...) Après des milliers de commentaires violents, même un seul vous renvoie à ce sentiment de ne pas leur échapper. Les pires d'entre eux m'envoient des mails, des menaces de morts, reviennent régulièrement, comme pour me rappeler leur existence et leur 'emprise'", explique à Mashable FR le jeune vidéaste. 

"S’il-te-plaît Internet, comprenons-nous"

Avec le recul, il reconnaît avoir fait des erreurs. Celles d’un homme "un peu jeune", "un peu naïf" qui dit parfois "de grosses conneries". Mais rien qui ne justifie un tel déferlement de haine, à ce niveau qu’il ne pensait "même pas possible". "Un harcèlement de cette ampleur remet en cause votre existence elle-même. Il vous fait revivre vos cauchemars les plus profonds. Il vous terrifie à l'idée de sortir dehors, de dormir la nuit, d’allumer votre téléphone, et globalement, il vous ote le droit d’aller sur Internet. Je garderais à jamais enfouies en moi les souffrances et les angoisses que ce harcèlement m'a causé. Je dois apprendre à vivre avec, et avancer", poursuit Dany.

Dans un discours qu’il qualifie lui-même de "schizophrénique", il appelle ses harceleurs, "les pas beaux", à prendre du recul sur leurs actes. "Ne pas faire aux autres ce qu’on aimerait pas qu’ils nous fassent, c’est la base de l’éthique et ça pourrait valoir le coup d’essayer sur Internet", dit-il, avant d'ajouter plus loin dans la vidéo : "S’il-te-plaît Internet, comprenons-nous. Je veux pas te mettre le fusil sur la tempe comme tu l’as braqué sur la mienne, non. Je veux juste que tu ressentes avec moi le fond de mon bide, la peur que j’ai à poster cette vidéo qui pourrait détruire ma vie comme la sauver".

Des cyberharceleurs condamnés

Le vidéaste expliquait en 2017 ne pas compter porter plainte. Il ne savait pas, comme de nombreuses autres victimes de cyberharcèlement, par quel bout commencer : qui attaquer en justice, lorsqu’on reçoit des messages insultants par centaines ? Le cyberharcèlement, pourtant, est bien puni par la loi, de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende lorsqu’il a été mené depuis un service de communication au public en ligne. "Les plaintes contre le cyberharcèlement sont déconsidérées, et je n'ai quasiment pas d'argent, je suis donc une cible idéale pour ces raisons", nous confesse-t-il. "J’aimerais que le législatif s’adapte à ces nouveaux enjeux, et vite."

"J’ai envie de continuer. J'ai travaillé dur, pendant cinq ans, pour en arriver là où j'en suis, pour en faire mon métier"

Depuis le mois de mai, le délit de cyberharcèlement peut aussi s'appliquer à des personnes envoyant très peu de messages, mais le faisant dans le cadre d'une vaste campagne d'attaques. Par ailleurs, les insultes à caractère homophobe et menaces de mort sont également punies. Mardi 3 juillet, deux des harceleurs de la journaliste Nadia Daam ont ainsi été condamnés pour menaces de mort et menace de commettre un crime.

Dany Caligula assure aujourd'hui "avoir rebondi". "J’ai envie de continuer. J'ai travaillé dur, pendant cinq ans, pour en arriver là où j'en suis, pour en faire mon métier, bien que je reste dans une situation précaire. J'ai envie de partager des choses, et s'il faut que je me batte pour ça, s'il faut que j'endure, je le ferais. J'ai passé un an à chercher quoi faire d’autre, à considérer d’autres options, mais je suis beaucoup trop passionné par ce que je fais et déterminé à combattre les idéologies violentes de notre siècle pour accepter le fait que je devrais m'autocensurer."

Dany Caligula semble ainsi prêt à reprendre du service. Mais dans un nouvel état d'esprit : "plus jamais on ne [l']empêchera de [s']exprimer". 

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