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Découvertes

Les singes de "La Planète des singes" de 1968, une vraie prouesse technique qui n'en a plus l’air

Pour la sortie du film "La Planète des singes : Suprématie", on s’est replongé dans les photos du tournage du 1er long-métrage, sorti en 1968. Une époque où la motion capture n’existait pas et où les acteurs passaient plus de 4 heures au maquillage.

Les singes créés par le maquilleur John Chambers pour "La Planète des Singes" de Franklin Schaffner en 1968.
Les singes créés par le maquilleur John Chambers pour "La Planète des Singes" de Franklin Schaffner en 1968. 20th Century Fox / Getty Images
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À peine publié en 1963, le roman de science-fiction "La Planète des singes", de l’écrivain français Pierre Boulle, tape dans l’œil d’un producteur américain. Le Californien Arthur Jacobs achète les droits du livre en 1965, convaincu du potentiel sur grand écran de cette histoire revisitée du darwinisme qui replace les singes en espèce dominante. À l’époque le défi est de taille : il faut mettre en scène des chimpanzés qui parlent et convaincre les spectateurs de les prendre au sérieux.

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John Chambers, le créateur des singes

Les premiers tests de maquillage et costume sont très compliqués, à tel point que la production du film est finalement retardée de deux ans. C’est finalement grâce à un certain John Chambers que les singes prennent vie. Cet ancien chirurgien de l’armée américaine fabriquait d'abord des prothèses d’oreilles ou de nez pour les soldats défigurés. Avant de se servir des mêmes techniques pour devenir make-up artiste. Alors après avoir confectionné les fameuses oreilles pointues de Monsieur Spock pour la série télévisée "Star Trek" et avant d’être recruté par la CIA pour concevoir des kits de "transformation d’identité" de ses agents de terrain, John Chambers s’attèle à transformer des acteurs en singes crédibles.

Ce pro du maquillage met au point une technique inédite à base de mousse et de caoutchouc pour former les visages des quelque 200 chimpanzés, orangs-outans et autres gorilles qui participent au tournage de "La Planète des singes". Comme Hollywood ne compte pas assez de make-up artistes pour cette tâche gigantesque à l’époque, John Chambers doit commencer par former près de 80 personnes à son art avant d’entamer le tournage.

"L’acteur Maurice Evans passe environ 4 heures et demie par jour à se faire maquiller pour son rôle d’orang-outan sage et respecté. Cela prend presque 3 heures pour former son visage, puis une heure et demie pour tout enlever à la fin de la journée. Comme le reste du casting, Maurice Evans a découvert qu’il pouvait transpirer à travers ce maquillage en mousse et caoutchouc, et faire bouger ses muscles faciaux. En fait, il assure même 'qu’après un certain temps, on oublie qu’on ressemble à un singe'", rapporte un reportage sur les coulisses du tournage publié dans le magazine Life du 18 août 1967.

Des contraintes techniques pour conserver les prothèses

Le tournage se déroule au bord du lac Powell en Arizona, où, sous près de 50 degrés, certains acteurs font des malaises à cause de la chaleur. Alors les "singes" passent un maximum de temps dans des caravanes climatisées entre les prises pour que leurs prothèses ne se décollent pas. Autres soucis techniques et non des moindres : boire et manger.

"Pour boire, ils se servaient de pailles. Pour fumer, de longs porte-cigarettes"

"Le maquillage leur permettait d’ouvrir la bouche, mais ils devaient d’abord utiliser un miroir pour voir où passer la nourriture", raconte John Chambers dans un hors-série du magazine Cinefantastique en 1972, "ils devaient fourrer la nourriture à travers leur bouche de singe avant d’atteindre leur vraie bouche. Mais ils ont vite appris à le faire sans miroir (…) Pour boire, ils se servaient de pailles. Pour fumer, de longs porte-cigarettes – et James Whitmore avait dû trouver une longue tige pour sa pipe. Et ils devaient éviter les plats trop mijotés comme les ragoûts."

En tout, le budget maquillage de "La Planète des singes" s’élèvera à 1,5 million de dollars, soit un tiers du budget global. "Le maquillage était notre plus grande dépense du film (…) et l’appliquer et l’enlever a pris 60 % du temps total de tournage", détaillait le producteur Arthur Jacobs à Variety. Un investissement remarqué et salué dès la sortie du film, et récompensé l’année suivante lorsque le make-up artiste John Chambers reçut un Oscar d’honneur pour son travail en 1969, treize ans avant la création de la catégorie "oscar des meilleurs maquillages et coiffures".

Du maquillage aux effets spéciaux

50 ans plus tard, le budget effets spéciaux a largement pris le dessus sur le budget make-up. Pour la réalisation du film "La Planète des singes : Suprématie", en salles françaises le 2 août, les coûts de tournage ne sont rien à côté de ceux des effets spéciaux. C’est simple, sur les "200 millions de dollars de budget" de ce long-métrage, "50 % ont été consacrés aux effets spéciaux", explique le réalisateur Matt Reeves de passage à Paris.

"100 millions de dollars consacrés aux effets spéciaux"

Le secret des singes ultra-réalistes et expressifs de cet ultime épisode de la saga (mené avec brio par Andy Serkis en César), c’est la performance capture bien sûr. Cette technique qui consiste à enregistrer les moindres gestes, attitudes, expressions et émotions des acteurs pour les transmettre ensuite aux personnages créés par ordinateur est née à la fin des années 1990, et avait déjà été utilisée pour les précédents "La Planète des singes : Les origines" et "La Planète des singes : L’Affrontement". Mais jamais de façon aussi avancée que cette fois.

50 artistes en charge des effets visuels, 10 caméramans, 35 à 45 caméras de capture de mouvements fixées partout, y compris sur la tête des acteurs, et "une armée de collecteurs de données, géomètres, et autres photographes chargée de rassembler des informations sur chaque détail des décors" ont été nécessaires pour la réalisation, détaille une note de production du film.

Ryan Stafford, coproducteur du film et producteur des effets visuels, a fait appel au studio néo-zélandais Weta Digital, "les meilleurs en matière de création de personnages et de simulation de fourrure". Des professionnels des effets visuels qui ont "repoussé les limites de l’animation en images de synthèse", notamment en utilisant pour la toute première fois de l’histoire du cinéma la motion capture dans des conditions météorologiques extrêmes : au sommet d’une montagne, sous la neige et avec des températures glaciales.

C’est sûr qu’aujourd’hui, à côté de leurs descendants à la fourrure parfaite et aux émotions à nous donner la chair de poule, les singes-acteurs du tout premier film de 1968 ont presque l’air grotesques. Pourtant à l’époque, les visages en caoutchouc de John Chambers étaient déjà une incroyable prouesse technique qui aura marqué des décennies de l’industrie des effets spéciaux avant que le numérique ne fasse sa révolution.

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