J’ai vu "Ghost in the shell" en 3D et testé la 4DX le même jour, et je crois que le cinéma va trop loin
Imax, 3D, 4DX ou VR… Au fil des ans, le cinéma reçoit des injections de nouvelles technologies pour le meilleur, et parfois le pire. Avec le risque de déconcerter certains spectateurs, comme j’en ai fait l’expérience.
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On m’a proposé d’aller tester "l’expérience cinéma inédite la plus immersive qui soit", dixit le communiqué de presse. CINÉMA – EXPÉRIENCE – IMMERSIVE, tous les mots-clés qu’il faut pour titiller ma curiosité de journaliste divertissement chez Mashable.
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Bon, ce lundi-là, au fond de moi, j’ai la douce impression que je vais revivre cette après-midi de 1999 où j’ai vu "Chéri, j’ai rétréci le public" avec des lunettes polarisantes dans la salle de cinéma sur vérins de Disneyland Paris. Mais sait-on jamais.
"Souffle d’air, eau, neige, éclair, fumée, odeur et tangage"
Direction le Pathé la Villette à Paris pour tester la toute première salle de cinéma de France qui propose des projections en 4DX. Installée dans l’un des grands fauteuils noir, regroupés en banquette de 4 et fixés sur un système pneumatique, j’assiste à une projection d’une vingtaine de minutes : essentiellement des bandes-annonces, et aussi un extrait de 10 minutes en 3D du film "Les Gardiens de la Galaxie" (le premier volet, sorti en 2014 – faut pas trop en demander non plus hein). L’occasion de tester en un temps limité la palette de tous les effets de cette salle un peu spéciale. Et il y en a une tripotée : souffle d’air, eau, neige, éclair, fumée, odeur, tangage, oscillation…
Secouée comme dans une machine à laver
J’ai l’impression d’avoir vécu ce que vivent nos fringues lors d’un cycle délicat en machine. Ça mouille, ça secoue, au début c’est marrant et puis au bout de 15 minutes je commence déjà à en avoir marre. L’expérience Disneyland 1999 n’est pas si loin que ça. Les lunettes 3D sont juste un peu plus modernes et les sièges plus confortables.
J’ai franchement du mal à imaginer pouvoir tenir comme ça pendant deux heures et apprécier le film projeté ("La Belle et la Bête", "Kong: Skull Island" ou "Logan" en ce moment), quand bien même on m’assure que les effets ne s’agitent que lors des scènes d’action. J’aime bien le cinéma, j’aime bien les parcs d’attraction. Mais pas les deux en même temps.
J'ai envie de vomir, merci la 3D
Hasard (ou plutôt malchance) du calendrier, une autre "expérience immersive" m’attend une petite heure plus tard. Autre lieu, autre ambiance. Je suis dans la salle de cinéma de l’hôtel Royal Monceau (une salle privée entre autre réservée aux projections pour les journalistes) pour découvrir le film "Ghost in the shell" en 3D. Un long-métrage, réalisé par Rupert Sanders et porté par Scarlett Johansson, très attendu au tournant car adapté du manga culte du même nom, dessiné par le Japonais Masamune Shirow et publié en 1989.
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Bon, je suis loin d’être une otaku, alors je n’avais pas particulièrement d’attentes quant à la qualité de l’adaptation des personnages, de l’univers ou de l’histoire du manga au film en live action. Et je ne peux donc pas en juger. Mais ce que je peux vous dire par contre, c’est que j’avais la gerbe en sortant.
Les projections en 3D, on y est pourtant habitués, surtout depuis l’énorme succès du film "Avatar" en 2009. En près de 10 ans, j’ai dû voir des dizaines et des dizaines de films en 3D. Et jamais je ne me suis sentie mal en sortant d’une salle. Jusqu’à cette semaine.
Tu veux de l'effet visuel, tu vas en avoir
Si "Ghost in the shell" était complètement novateur en 1989 – Rupert Sanders, le réalisateur, dit d’ailleurs de Masamune Shirow qu’il est "le Nostradamus de la science-fiction" – le synopsis est aujourd’hui beaucoup moins surprenant : on ne compte plus les histoires d’humains équipés d’implants cybernétiques et de robots qui deviennent des tueurs, au cinéma ("Terminator", "Transformers") comme à la télévision ("Black Mirror", "Westworld"). Et surtout plus si futuriste que ça : en 2014, des chercheurs américains ont par exemple intégré des implants dans le cerveau de patients pour améliorer leur mémoire.
"Weta et MPC : ce qui se fait de mieux dans l’industrie mondiale des effets spéciaux"
Alors j’imagine que pour scotcher sur les sièges tous les spectateurs, Rupert Sanders a cru bon d’enchaîner en 1 h 46 tous les effets visuels possibles. Le réalisateur a emmené toute son équipe en Nouvelle-Zélande pour tourner (en prises de vues réelles) son film, et surtout pour pouvoir travailler avec le studio Weta, installé à Wellington, à la pointe de la post-production. Après avoir réalisé les effets numériques et/ou mécaniques d’"Avatar" ou de la trilogie "Le Seigneur des anneaux", le studio a acquis une renommée internationale. Ajoutez à cela la participation du mastodonte studio MPC et vous avez ce qui se fait de mieux dans l’industrie mondiale des effets spéciaux. Alors quand certains parleront peut-être de "claque visuelle" (comme je l’ai entendu en sortant de la projection), moi je garderai de l’expérience "Ghost in the shell" la sensation d’être montée et descendue 20 fois de suite dans l’ascenseur de la tour Montparnasse.
Tant pis si je passe pour une vieille aigrie conservatrice, je le dis : LE CINÉMA TU VAS TROP LOIN. Je ne suis pas particulièrement contre le changement, encore moins les nouvelles technologies (hé oh, je bosse chez Mashable quand même). Mais après ces projections physiquement éprouvantes pour moi, je me dis qu’à trop vouloir en mettre plein les yeux en rajoutant des fioritures – visuelles ou matérielles – on risque de perdre l’essence du cinéma. Alors qu’une putain de bonne histoire devrait suffire à nous secouer ou à nous clouer à notre fauteuil.
Ah oui au fait, combo ultime du "futur du cinéma" : le Pathé la Villette diffusera dès mercredi 29 mars le film "Ghost in the shell" en 3D ET en 4DX. Mais j’imagine que vous savez ce que j’en pense.
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